
Dakar étouffe. La capitale du Sénégal a connu un énorme essor démographique, elle est passée de 500 000 habitants en 1967 à plus de 3 millions aujourd’hui, elle croît de 4% par an. Les embouteillages bloquent la ville, le port est saturé, et le logement devient inaccessible. Le Sénégal est alors porté par un ambitieux Plan Directeur d’Urbanisme pour faire de Dakar, d’ici 2035, une métropole moderne et compétitive. À quoi ressemblera vraiment la capitale dans dix ans ?
- Une nouvelle géographie urbaine : Dakar de décentre
- Diamniadio, la ville du futur
À la distance de 30 kilomètres de la capitale Sénégalaise Dakar, à l’intérieur de l’espace de 1 644 hectares civilisés et réaménagés, sera construite la ville de Diamniadio pour abriter la population générale. Le début d’une nouvelle ville devant correspondre à l’ambition de soulager la ville-capitale. Les infrastructures répondent à leurs ambitions : Centre International de Conférences Abdou Diouf, le stade de 50 000 places avec centrale solaire et le Parc des Technologies Numériques ou encore les quinze ministères relocalisés à ce jour.
Pourtant, en 2025, Diamniadio est avant tout une coquille vide. Les observateurs notent qu’elle demeure une ville où l’on se rend pour travailler davantage qu’une ville où l’on habite. Les prix immobiliers restent très élevés : de 15 000 à 30 000 FCFA le m². Pour que Diamniadio devienne vraiment une ville en 2035, il faudra créer des commerces de proximité, des écoles, et surtout des logements accessibles à la classe moyenne.
- Une constellation de nouveaux pôles
D’autres projets complètent cette stratégie : le pôle urbain du Lac Rose comme destination touristique, les zones de Daga Kholpa et Bambilor autour de l’aéroport international Blaise Diagne. Cette constellation vise à transformer Dakar d’une ville saturée et monocentrique à une métropole polycentrique. D’ici 2035, Dakar sera un archipel de villes satellites connectées, chacune avec sa vocation propre, réduisant ainsi la pression sur le centre historique.
- Des infrastructures pour une métropole moderne
- La révolution des transports collectifs
Pour lutter contre la congestion urbaine à Dakar, deux projets structurants sont en phase de réalisation : d’une part, le Bus Rapid Transit (BRT) sera relié le Plateau à Guédiawaye (184 milliards de FCFA) et d’autre part, le Train Express Régional (TER) dont la ligne ouverte depuis décembre 2021 fait déjà la liaison Dakar à Diamniadio en 35 minutes sur 36 km et devant être prolongée vers l’aéroport. L’ambition du Plan de Mobilité Urbaine Durable horizon 2035 est d’améliorer de 60 % la fiabilité du réseau de transport et de réduire de 15 % les émissions de CO2 à cette date tout en offrant aux Dakarois de meilleures conditions de mobilité.
- Des infrastructures de base renforcées
Au-delà de la région capitale et au-delà du seul corridor urbain Dakar-Diamniadio, l’autoroute à péage conduit aux autres territoires à investir et participe à l’articulation de l’espace. Le maillage énergétique se renforce avec les nouvelles centrales solaires tout comme le centre de données, de 1 000 téraoctets de mémoire. Un projet d’usine de dessalement qui pourra être lancé « dans les brefs délais » et qui fournira 50 000 mètres cubes d’eau traitée par jour vient y ajouter une réponse à l’accroissement de l’approvisionnement en eau. Ces équipements doivent permettre de construire l’ossature nécessaire à la prise en charge des besoins en infrastructures d’une population en forte croissance, tout en intégrant des considérations de durabilité.
- Un pôle économique régional en devenir
- Le port de Ndayane : un géant qui change la donne
À environ cinquante kilomètres au sud de la capitale du Sénégal, le port de Ndayane représente le plus grand investissement privé de l’histoire du pays, 1,2 milliard de dollars, construit par la société DP World pour pouvoir accueillir les plus grands porte-conteneurs du monde, avec un tirant d’eau de 18 à 20 mètres de manière à assurer les eaux suffisamment profondes pour la plus grande partie à pleine charge des navires dans les ports (ou ports-ateliers du littoral, côtes qui s’annoncent comme plus que les autres lors de sa construction).
La première phase de construction du port, située près de La Somone, est projetée entre 2026 et 2028 et comprendra un quai de 840 mètres susceptible d’accueillir plus de 1,2 million d’équivalents vingt pieds. Les prévisions se promettent en effet encourageantes : le port devrait contribuer au PIB sénégalais à hauteur de 3 % et produire 15 milliards de dollars de valeur commerciale d’ici 2035.Dans le cadre sec des emplois, ressort une création de 2,3 millions d’emplois dont 22 000 liés directement à des activités portuaires. Le méga-port fera du Sénégal un hub commercial majeur en Afrique de l’Ouest.
- Un écosystème économique intégré
Le port s’inscrit dans un écosystème qu’on peut considérer comme intégrant l’aéroport Blaise Diagne et une zone économique spéciale. Diamniadio devrait devenir le pôle technologique et administratif du pays tandis que la Maison des Nations Unies et le Centre International de Conférences joueraient un rôle de levier dans l’attractivité internationale du pays.
- Les défis de l’inclusivité
On peut pourtant s’interroger sur cette bulle d’optimisme. En effet, des 605 projets envisagés, 16 % étaient totalement achevés en 2025, 42 % en cours de travaux et 41 % en attente malgré des délais dépassés, ce qui interroge sur la finalisation du tout. La principale interrogation qui émerge serait l’accessibilité pour tous : comment assurer une telle croissance pour tous et non en enclaves de prospérité pour un nombre limité ? Les prix de la terre risquent d’exclure une grande partie du tissu des Dakarois. Pour la réalisation d’une vision pour 2035, les logements à coût accessible et les emplois pour tous les niveaux de qualification devront être des priorités.
Conclusion
Dakar 2035 se dessine comme une métropole polycentrique et connectée : nouvelles villes satellites, infrastructures modernes, grand port commercial. La vision est ambitieuse et répond aux défis de la croissance démographique.
Pourtant, entre vision et réalité, le chemin reste long. La décennie 2025-2035 sera décisive. Il faudra accélérer les projets en retard, transformer les coquilles vides en véritables villes vivantes, et garantir que cette transformation profite à tous. Si ces conditions sont réunies, Dakar pourrait devenir un modèle de ville africaine du XXIe siècle. Sinon, la capitale risque de reproduire à plus grande échelle les mêmes problèmes qu’aujourd’hui. L’avenir de Dakar se joue maintenant.
Article rédigé, par Lima Diop de Mondialannonce